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Les crevettes pailletées (2019) Cédric Le Gallo et Maxime Govare

par Neil 8 Mai 2019, 02:48 2010's

Fiche technique
Film français
Date de sortie : 8 mai 2019
Genre : confrontation hétéroclite
Durée : 1h40
Scénario : Cédric Le Gallo, Maxime Govare et Romain Choay
Image : Jérôme Almeras
Musique : Thomas Couzinier et Frédéric Kooshmanian
Avec Nicolas Gob (Matthias Le Goff), Alban Lenoir (Jean), Michaël Abiteboul (Cédric), David Baïot (Alex), Romain Lancry (Damien), Roland Menou (Joël), Geoffrey Couët (Xavier), Romain Brau (Fred), Félix Martinez (Vincent)…

Synopsis : Après avoir tenu des propos homophobes, Matthias Le Goff, vice-champion du monde de natation, est condamné à entraîner « Les Crevettes Pailletées », une équipe de water-polo gay, davantage motivée par la fête que par la compétition. Cet explosif attelage va alors se rendre en Croatie pour participer aux Gay Games, le plus grand rassemblement sportif homosexuel du monde. Le chemin parcouru sera l’occasion pour Matthias de découvrir un univers décalé qui va bousculer tous ses repères et lui permettre de revoir ses priorités dans la vie.

Mon avis : Allons-y gayment

Initialement journaliste, Cédric Le Gallo fait partie d’une association LGBTQI de water-polo. Il a réalisé le programme court « Scènes de culte » pour Canal Plus séries, et c’est là qu’il a rencontré le producteur Édouard Duprey. Il se montre intéressé par l’idée initiale de monter un film autour de cet univers, et Cédric Le Gallo commence à travailler autour du scénario de ce qui deviendra Les crevettes pailletées. Pour ce faire, il collabore avec Maxime Govare, qui avait réalisé deux long-métrages et des téléfilms. Ils cheminent vers cette histoire qui louche vers Le grand bain, mâtiné à des références issues de la culture anglo-américaine, version The full monty ou bien Little miss sunshine. Ils montent alors le casting, et trouvent des acteurs qui viennent d’univers différents (de Plus belle la vie au cabaret Madame Arthur), pas forcément très connus, et qui s’embarquent dans une aventure a priori improbable.

Matthias Le Goff, vice-champion du Monde de natation, fait des exercices de musculation chez lui en regardant la télévision. Un reportage sur lui passe aux nouvelles : il doit être jugé pour les propos homophobes qu'il a tenu après une course de natation. À la fédération il est confronté à sa victime et ne trouve comme argument pour sa défense que le fait qu'il ne savait pas que son interlocuteur était homosexuel. À la sortie, le directeur de la fédération livre un discours formaté sur le sport vecteur de tolérance et Matthias est contraint, s'il veut concourir aux prochains Championnats du Monde, de coacher une équipe de water-polo s'apprêtant à participer aux Gay games en Croatie. Bon an mal an, il se rend à la piscine où il trouve dans les vestiaires neuf hommes pas complètement convaincus de vouloir se faire entraîner par lui.

Le registre principal des Crevettes pailletées est l'exubérance. Les personnages sont outrageusement dépeints, les situations sont stéréotypées et la mise en scène ne fait pas dans l'épure. Et pourtant ça marche très bien, hormis un premier quart d'heure qui, à l'image de la bande-annonce du film, fait craindre le pire. Le scénariste et coréalisateur, qui connaît bien son sujet, cite volontiers comme référence Priscilla, folle du désert, et on comprend pourquoi. Ces séquences délibérément outrancières sont à l'image des membres de l'équipe authentique des Shiny shrimps, qui osent l'improbable, se fichant pas mal du ridicule. Et justement, certains dialogues du film frisent parfois franchement le ridicule, à l'image de ce passage un tantinet lénifiant où le point Godwin n'est pas loin. Mais au final, le scénario rattrape le tout.

Ce que l’on retient des Crevettes pailletées est en premier lieu son habile construction. Le film prend le temps de poser ses enjeux dramatiques, petit à petit, jusqu’à ce qu’ils arrivent à maturité. Ainsi, l’émotion surgit au moment où on ne l’attend pas, elle grandit crescendo pratiquement sans que le spectateur ne s’en aperçoive. Et chacune des scènes est bâtie sur ce même modèle, partant d’un humour à la limite de la balourdise pour finalement cueillir le spectateur, certes avec des situations qui ne relèvent que du bon sens, mais amenées d’une façon finalement très élégante. Le film brasse une quantité de sujets, tous aussi pertinents les uns que les autres, de l’homophobie à la maladie en passant par le militantisme, au risque d’en survoler certains ou de maltraiter le traitement de ses personnages.

Mais qu’importe, l’essentiel est là, et Les crevettes pailletées a tout de même la qualité de suivre sa ligne narrative jusqu’au bout, en emportant avec lui le spectateur. Les traits d’humour sont parfois très efficaces, certaines punch-lines méritent le détour, et l’intensité dramatique est au rendez-vous. Le film parvient à trouver un juste milieu entre les comédies dramatiques « à la française », les bromances à la Judd Apatow ou les Feel good movies à la mode. Il s’appuie sur une bande-originale quasiment parfaite, qui parvient à mélanger une version inédite de Boys, boys, boys (si, si, rappelez-vous de Sabrina) avec le trop souvent oublié Lotus de R.E.M. pour finir avec l’incontournable Kid d’Eddy de Pretto, complètement en phase avec le propos du film. On ressort de la projection à la fois secoué et enjoué, heureux d'avoir passé un bon moment de cinéma.

Ma note : ***

Les crevettes pailletées (2019) Cédric Le Gallo et Maxime Govare
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