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Vita & Virginia (2019) Chanya Button

par Neil 10 Juillet 2019, 03:24 2010's

Fiche technique
Film britannique
Date de sortie : 10 juillet 2019
Durée : 1h50
Genre : passion créatrice

Scénario : Chanya Button, d’après l’oeuvre d’Eileen Atkins
Image : Carlos de Carvalho
Musique : Isobel Waller-Bridge

Avec Gemma Arterton (Vita Sackville-West), Elizabeth Debicki (Virginia Woolf), Rupert Penry-Jones (Sir Harold Nicolson), Peter Ferdinando (Leonard Woolf), Isabella Rossellini (Lady Sackville), Gethin Anthony (Clive Bell)…

Résumé : Virginia Woolf et Vita Sackville-West se rencontrent en 1922. La première est une femme de lettres révolutionnaire, la deuxième une aristocrate mondaine. Quand leurs chemins se croisent, l'irrésistible Vita jette son dévolu sur la brillante et fragile Virginia. Commence une relation passionnelle qui fait fi des conventions sociales et de leurs mariages respectifs.

Mon avis : On en vient à aimer son désir et non plus l’objet de ce désir

Le projet de Vita & Virginia a été initié par Dame Eileen June Atkins, personnage influent du paysage culturel anglo-saxon. Au théâtre, elle a été membre de la fameuse Royal Shakespeare Company, à la télévision elle a créé la série Upstairs, Downstairs et elle a interprété la reine Mary de Teck dans The crown, tandis qu’au cinéma elle a fait partie de nombreuses productions britanniques, de Gosford Park à Retour à Cold Mountain. Sa carrière a souvent croisé la figure de Virginia Woolf : elle a joué le rôle de l’écrivaine britannique sur scène, notamment dans les adaptations successives d’Une chambre à soi, le pamphlet féministe que l’auteur a écrit à la fin des années 1920. En 1992, elle écrit la pièce Vita & Virginia, qui traite de la liaison entre Virginia Woolf et Vita Sackville-West. La pièce et le film donnent une large place au Bloomsbury Group, un groupe d’intellectuels anglais qui a compté parmi ses membres, outre l’auteure de Mrs Dalloway, E. M. Forster ou bien John Maynard Keynes.

Invités à une émission de radio, Vita Sackville-West et son mari Sir Harold Nicolson exposent leur vision libérale du couple, et se chamaillent sur la place à accorder à la femme, tant dans la sphère intime que publique. De l’autre côté du transistor, Virginia Woolf écoute avec curiosité ces théories novatrices. En sortant du studio d’enregistrement, Vita annonce à son époux qu’elle souhaite répondre favorablement à l’invitation à une soirée organisée par la sœur de Virginia, la peintre Vanessa Bell. Quand elle en parle à sa mère, celle-ci lui interdit d’aller à cette réception, sous peine de lui couper les vivre, suite à la liaison qu’elle vient de traverser avec une femme, Violet Keppel.  Admiratrice de l’écrivaine, Vita se rend tout de même à la soirée et elle demande à Clive Bell de faire les présentations. L’accueil que lui réserve Virginia est réservé : celle-ci éprouve une fascination en demi-teinte envers cette aristocrate excentrique qui publie des romans à succès.

Le soin apporté à la reconstitution historique dans Vita & Virginia est assez impressionnant. On se croirait presque faire partie de ce Bloomsbury Group, un cercle d’intellectuels absolument fascinant. Les soirées organisées sont particulièrement bien retranscrites : tout comme dans Gatsby le magnifique on ressent l’effervescence qui entourait les esprits de l’élite de cette époque. Les décors et les costumes apportent la touche d’époque sans que cela ne sente la naphtaline, et la musique composée par Isobel Waller-Bridge, la sœur aînée de la créatrice de l’excellent Fleabag, renforce ce décalage, rendant complètement contemporain l’univers du film. Les thèmes développés sont d’ailleurs tout à fait d’actualité, de l’ « empouvoirement » à la liberté sexuelle, voire même à la fluidité des genres évoquée dans Orlando, le roman écrit par Virgina Woolf qui s’inspirait de Vita Sackville-West.

Ce qui est remarquablement traité dans Vita & Virginia, et ça tombe bien puisque c’est le thème principal du film, c’est la relation passionnelle et compliquée qu’ont pu vivre les deux protagonistes du film. Vita est clairement attirée par Virginia avant même leur rencontre : ses mots la touchaient directement et sa sensibilité lui parlait. Virginia éprouve quant à elle des sentiments mitigés et tourmentés, à l’image de sa propre personnalité. C’est là où le film parvient à atteindre assez subtilement l’âme complexe d’un personnage comme Virginia Woolf, dont la fragilité mentale est ici assez bien évoquée, quoique peut-être de façon un peu trop appuyée, surtout avec ces passages récurrents près de l’élément aquatique qui causera sa perte. Mais la naissance du désir antre ses deux êtres, son accomplissement, le manque et ensuite la violence du rejet qu’elles ont pu ressentir s’incarne à l’écran de façon vibrante.

Production à la facture très britannique, Vita & Virginia bénéficie en outre d’un casting à la hauteur. Les deux principales actrices s’emparent de leur rôle respectif de façon tout à fait remarquable. On n’avait pas vu Gemma Arterton aussi en forme depuis bien longtemps, elle donne chair à cette personnalité visiblement truculente qu’était Vita Sackville-West. Elizabeth Debicki trouve ici un rôle à sa mesure, après avoir été remarquée dans le discret rôle de Jordan Baker dans Gatsby le magnifique. Le seul hic que l’on peut reprocher est l’incongruité de l’âge : Virginia Woolf avait dix ans de plus que Vita Sackville-West, tandis qu’Elizabeth Debicki en a cinq de moins que Gemma Arterton. Elles sont entourées de solides actrices et acteurs britanniques, que ce soit Emerald Fennell, aperçue dans les séries Killing Eve et Victoria, ou Gethin Anthony, que l’on a pu voir dans Game of thrones. Ce casting très british est agrémenté de la magnifique et intemporelle Isabella Rossellini, toujours aussi excellente.

Ma note : ***

Vita & Virginia (2019) Chanya Button
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