
Fiche technique
Film français
Date de sortie : 12 mars 2014
Durée : 1h29
Genre : année scolaire
Image : Julie Bertuccelli
Musique : Olivier Daviaud
Résumé : ils viennent d’arriver en France. Ils sont Irlandais, Serbes, Brésiliens, Tunisiens, Chinois ou Sénégalais... Pendant un an, Julie Bertuccelli a filmé les échanges, les conflits et les joies de ce groupe de collégiens âgés de 11 à 15 ans, réunis dans une même classe d’accueil pour apprendre le français. Dans ce petit théâtre du monde s’expriment l’innocence, l’énergie et les contradictions de ces adolescents qui, animés par le même désir de changer de vie, remettent en cause beaucoup d’idées reçues sur la jeunesse et l’intégration et nous font espérer en l’avenir... (allocine)
Mon avis : derrière les murs
Lors du Festival Ciné-Clap de Chartres, en 2012, la réalisatrice Julie Bertuccelli vient présenter son long-métrage L’arbre et fait partie du jury. Au programme cette année là dans la compétition un film présenté par des élèves du collège parisien La grange-aux-belles. La réalisatrice, qui a débuté aux côtés d’Otar Iosseliani, trouve alors le sujet de La cour de Babel. Ce n’est pas pour elle une première incursion dans la voie documentaire, celle-ci ayant débuté sa carrière par ce genre. C’est Depuis qu'Otar est parti qui va lui apporter une plus grande reconnaissance, le long-métrage étant nommé au Césars pour son scénario et décrochant le trophée de la Meilleure première œuvre, après être passé par la Semaine de la critique à Cannes où il avait obtenu le Grand prix.

C'est la rentrée et tous les élèves passent au tableau pour expliquer aux autres la manière dont ils disent « bonjour » dans leur langue maternelle. Car au collège de la Grange aux belles de Paris, cette classe accueille plusieurs enfants qui viennent de l'étranger. Lorsque Rama, sénégalaise, se présente devant ses camarades, elle annonce tout de go qu’elle ne saurait pas écrire le mot en wolof ; l’institutrice, madame Cervoni, lui demande alors de simplement le prononcer. La jeune fille dit alors « As-salâm 'aleïkoum », ce qui ne plaît pas à une autre élève, égyptienne, qui lui rétorque que ce mot ne signifie pas exactement « bonjour ». Rama s’énerve alors, lui rétorquant qu’elle ne peut pas savoir comment on le dit au Sénégal. Madame Cervoni lui demande alors d’écrire le mot en sénégalais, ce qui apaise les tensions.
Si certains films ont du mal à afficher leurs intentions, ce n’est certainement pas le défaut que l’on pourrait donner à La cour de Babel. Il se dégage du documentaire un souffle humaniste qui fait beaucoup de bien en ces temps de polémiques où le nationalisme frise la xénophobie. L’idée est de présenter une vingtaine de primo-arrivants désireux de s’intégrer, via la bonne vieille institution de notre école de la République. Nous retrouvons des enfants de diverses nationalités, qui ont chacun un parcours de vie chaotique.

Et la caméra de Julie Bertuccelli les suit les uns et les unes après les autres, sans parti-pris de réalisation sinon celui du montage. Car la réalisatrice a effectué un travail exigeant et qui paye, sélectionnant des heures de tournage puisqu’elle les retrouvait deux fois par jour durant toute l’année scolaire. Et si certains personnages de La cour de Babel semblent plus ou moins bien apprivoiser l’objet filmique, tous et toutes se dévoilent au cours du temps. L’ambiance se déride petit à petit, et cela se ressent jusque dans la salle de cinéma où les rires se déploient et l’émotion jaillit de façon inattendue.
Nous éprouvons peu à peu de l’empathie pour ces enfants aux trajectoires de vie compliquées, obligés d’assumer trop tôt des responsabilités qui ne devraient pas leur incomber. Et une autre figure émerge au cours de La cour de Babel, celle de l’institutrice, au début absente du cadre et qui prend progressivement de l’importance. C’est ainsi en creux un hommage qui est décerné non seulement à l’institution scolaire, qui accomplit ici un rôle primordial, mais également à cette belle personne qui fait preuve d’une douceur et d’une patience rare.
Ma note : ***