Fiche technique
Film danois
Date de sortie : 10 août 2011
Genre : fin du monde
Durée : 2h10
Scénario : Lars von Trier
Image : Manuel Alberto Claro
Avec Kirsten Dunst (Justine), Kiefer Sutherland (John), Charlotte Gainsbourg (Claire), John Hurt (Dexter), Charlotte Rampling (Gaby), Stellan Skarsgard (Jack)…
Synopsis : À l'occasion de leur mariage, Justine et Michael donnent une somptueuse réception dans la maison de la sœur de Justine et de son beau-frère. Pendant ce temps, la planète Melancholia se dirige vers la Terre... (allocine)
Mon avis : La mariée broyait du noir
Juste une mise au point : durant le Festival de Cannes 2011, Melancholia a suscité la polémique, ou plutôt c‘est Lars von Trier qui s‘est attiré les foudres populaires. Propos maladroit ou bêtise congénitale, le fait est que le réalisateur fut persona non grata durant le reste de la compétition et que cela affaiblissait prétendument les chances du film pour le palmarès. Résultat des courses, un Prix d’interprétation féminine pour Kirsten Dunst, amplement mérité du reste. Paradoxe d’un réalisateur qu’on a accusé de misanthropie et qui pourtant met en valeur les femmes dans quasiment tous ses films. Ce qui aura également valu au passage à Björk et à Charlotte Gainsbourg de se voir récompensée dudit Prix d’interprétation. L’homme est ce qu’il est, son œuvre est plus importante que le reste.
Préambule : des quasi-peintures magnifiques et légèrement animées nous font voir des scènes d‘apocalypse. Puis l’on suit le délicat passage d’une immense limousine dans un chemin de campagne, essayant de se frayer une trajectoire dans les virages. À l’intérieur se trouve Justine, une jeune mariée resplendissante de bonheur avec son homme. Ils tentent tout ce qu’ils peuvent pour aider le chauffeur à manœuvrer l’engin, en vain. Terminant le trajet à pied, ils sont reçus dans un somptueux château par Claire, la sœur de Justine, très remontée à cause de leurs deux heures de retard. Ils arrivent enfin à la réception où les convives les accueillent chaleureusement et le repas de noces peut finalement débuter.
La construction de Melancholia est ingénieusement étudiée : deux parties forment le film, qui se répondent parfaitement l‘une à l‘autre. La première, centrée sur le personnage de Justine, est une farce sur le mariage qui questionne les coutumes parfois pompeuses et surannées accompagnant l’institution. En parallèle, on suit l’évolution du personnage de Justine qui éprouve petit à petit un malaise qu’on peut qualifier de mélancolie. À côté, Claire fait preuve d’une force de caractère impressionnante, assistant sa sœur à tout instant et encaissant dignement les aléas d’une cérémonie préparée de longue date et les réactions ulcérés de l’entourage.
Puis la seconde partie survient, justement centré sur le personnage de Claire. Plus sombre, ce deuxième acte voit la lente perte de moyens de cette femme qu’on croyait si forte et en parallèle la montée en gamme de Justine, qui acquiert soudain un rôle prophétique dans cette ambiance de fin du monde annoncée. Un délicat dosage s’opère ainsi dans Melancholia, à la fois dans le ton des deux parties et dans l’importance des personnages et leurs caractères. Pour cela, Lars von Trier dirige parfaitement un casting haut de gamme. D'une part Kirsten Dunst s’avère particulièrement convaincante dans ce rôle ingrat qu’elle porte de bout en bout.
Mais les autres acteurs ne sont pas en reste, Charlotte Gainsbourg en tête ainsi que tous les second rôles. La mise en scène fébrile du réalisateur danois, qu’au début on peut légitimement ne pas apprécier, met ici impeccablement en valeur la tension qui règne durant tout le dîner puis les jours qui suivent. La réflexion cosmologique, fortement pessimiste, fait dans Melancholia (et contrairement à The tree of life, sorti quelques mois auparavant) totalement abstraction de l’aspect divin : seuls les êtres humains comptent, et encore. Nous ne sommes que poussière et nous retournerons à la poussière : ah tiens, le message théologique n’est finalement peut-être pas si loin.
Ma note : ****