
Fiche technique
Film franco-chinois
Titre original : Chun feng chen zui de ye wan
Date de sortie : 14 avril 2010
Genre : amours interdites
Durée : 1h55
Scénario : Mei Feng
Photographie : Jian Zeng
Musique : Peyman Yazdanian
Avec Qin Hao (Jiang Cheng), Tan Zhuo (Li Jing), Wei Wu (Wang Ping), Jiang Jiaqi (Lin Xue), Chen Sicheng (Luo Haitao)…
Synopsis : Nankin, de nos jours, au printemps. La femme de Wang Ping le soupçonne d'infidélité. Elle engage Luo Haitao pour l'espionner et découvre ainsi l'amour que son mari porte à un homme, Jiang Cheng. C'est avec lui que Luo Haitao et Li Jing, sa petite amie, se jettent alors à corps perdu dans une folle équipée amoureuse...(Allociné)
Mon avis : Ménages à trois dans l’empire du milieu
Prix du scénario au Festival de Cannes l’an dernier, Nuits d’ivresse printanière est un rescapé. Rescapé d’un système qui maltraite furieusement la liberté puisque son réalisateur, Lou Ye, subit depuis quelques années la censure dans son pays natal. Son dernier film, Une jeunesse chinoise, y est pour quelque chose puisqu‘il évoquait la répression de Tien an men que les autorités nationales préfèrent ostraciser. Nuits d’ivresse printanière, dont le nom vient d’un poème de 1923 écrit par Yu Dafu, évoque encore une fois la jeunesse chinoise avec fougue et ferveur, osant briser le tabou local de l’homosexualité.
Jiang Cheng et Wang Ping vivent une histoire d‘amour belle et simple. Ils se retrouvent cependant dans la clandestinité car Wang Ping est marié. Seulement sa femme Lin Xue se doute de quelque chose. C’est pourquoi elle le fait suivre par Luo Haitao, qui lui montre des photos compromettante des deux amants. Lin Xue ne se laisse pas faire et sème le trouble auprès de Jiang Cheng. Celui-ci ne voit pas d’autre solution que de quitter Wang Ping sans coup férir. C’est alors qu’à la faveur de circonstances il se rapproche de Luo Haitao et de sa compagne Li Jing.
Séparé en deux parties inégales, Nuits d’ivresse printanière nous plonge dans l’univers tourmenté de son personnage principal, Jiang Cheng. La première partie, frénétique, met en place une histoire d’amour forte et poignante tandis que la seconde, moins prosaïque, emmène le spectateur dans une spirale de sentiments et de passions. Passionné par le cinéma de François Truffaut, Lou Ye rend ici un hommage particulier à Jules et Jim, inversant les rôles féminins/masculins de l’original. Le réalisateur complexifie cependant son récit en entremêlant les histoires de chacun de ses protagonistes, leur donnant ici à chacun une épaisseur particulière.
Ce n’est pourtant pas forcément le scénario de Nuits d’ivresse printanière qui frappe le plus mais sa force romanesque et la qualité de sa mise en scène. Car tout en sobriété, Lou Ye maîtrise très bien le cadre de chacune des scènes du film. Il place son histoire dans un cadre résolument moderne, jonglant entre les différents outils de communication tout en donnant à son récit, à travers des illustrations poétiques, un caractère plus universel que la simple anecdote qu‘il laisse voir. Qin Hao est la révélation incontestable du film, l’acteur transcende tous les plans sur lesquels il figure par son magnétisme et sa beauté fulgurante. Il rend son personnage tourmenté attachant tout en lui apportant une part d’ombre non négligeable, et appréciable. Si les deux parties du film ne sont pas d’une qualité égale, Nuits d’ivresse printanière est un témoignage important sur la Chine d’aujourd’hui, mais aussi un film vibrant sur l’amour et sur la passion.
Ma note : **