Fiche technique
Film sud-coréen
Date de sortie : 23 janvier 2013
Titre original : Do-nui Mat
Genre : univers impitoyable
Durée : 1h54
Scénario : Im Sang-soo
Image : Woo-hyung Kim et Kim Sung-kyu
Musique : Kim Hong-jip
Avec Kim Kang-woo (Youngjak), Yun Yeo-Jung (Keumok), Yun-Shik Baek (Kyungsun), Hyo-jin Kim (Nami), On Ju-wan (Chul), Maui Taylor (Eva)...
Résumé : Youngjak est le secrétaire de Madame Baek, dirigeante d’un puissant empire industriel coréen. Il est chargé de s’occuper des affaires privées de cette famille à la morale douteuse. Pris dans une spirale de domination et de secrets, perdu entre ses principes et la possibilité de gravir rapidement les échelons vers une vie plus confortable, Youngjak devra choisir son camp, afin de survivre dans cet univers où argent, sexe et pouvoir sont rois…
Mon avis: bienvenue au royaume de l'argent roi
La situation politique actuelle en Corée du Sud a visiblement été un détonateur pour la préparation de L'ivresse de l'argent. Im Sang-soo n'aime pas trop le président actuel, Lee Myung-bak, qu'il trouve trop bling-bling à son goût. Tout du moins porte-t-il trop haut les valeurs de l'argent facile. Et le réalisateur sud-coréen de vouloir dresser un portrait à l'acide de ces classes dirigeantes qui méprisent le petit peuple et s'en sortent toujours avec des pots de vin. C'était déjà un peu son propos avec The housemaid, présenté au Festival de Cannes comme celui-ci, les deux films pouvant être considérés comme un ensemble. Ainsi l'on retrouve cette famille patibulaire mais presque, où la petite fille aurait grandi sous la chape de cette figure maternelle tyrannique, qui écrase également son mari.
Dans un clan familial d'industriels mafieux, le jeune Youngjak fait office d'homme à tout faire. Officiellement secrétaire de Madame Beak, à la tête de cet empire, il accomplit à l'occasion quelques basses œuvres dont il n'est pas particulièrement fier. Quand Madame Baek l'appelle il est toujours au rendez-vous, refusant même les verres de vin que lui propose sa fille Nami. Elle se montre d'ailleurs assez arrogante avec lui, le provoquant régulièrement et lui disant à quel point sa famille la révulse. Son père développe une liaison avec la bonne, Eva, et un soir Youngjak les découvre dans une situation bien compromettante. Regrettant l'instant d'après cette découverte malheureuse, il ne sait pas quoi faire de cette information. Il sait bien dans quelle rage se mettrait sa maîtresse si d'aventure elle apprenait la nouvelle.
Le pouvoir, l'argent et le sexe : voilà les principaux ingrédients de L'ivresse de l'argent. Et Im Sang-soo de nous le répéter à l'envi, alternant scènes de sexe et scènes de corruption ou de transit d'argent sale. Le propos est grinçant, parfois un peu trop appuyé mais assez efficace. Il s'appuie sur une mise en scène au couteau, comme à son accoutumé : Thierry Frémaux l'avait dit lors de la conférence d'ouverture du Festival, c'était le film le mieux mis en scène de la sélection Cannoise (hormis le Carlos Reygadas, d'après le jury,,,).
Il peut également compter sur un casting très homogène, porté par une excellente actrice coréenne : Yun Yeo-Jung est terrifiante et glaçante, tout en arrivant à faire passer des ombres de doute sur son visage, parvenant presque à nous faire éprouver de l'empathie pour son personnage. Et la société que nous dépeint L'ivresse de l'argent n'est pas très reluisante. Le héros du film aura bien du mal à sauver son intégrité dans un monde sans valeurs, mis à part l'argent. Im Sang-soo utilise de nombreuses scènes chocs, mais moins violentes que dans ses films précédents.
Dans L'ivresse de l'argent la violence est plus intériorisée, mais également plus sournoise. Les luttes sont plutôt celles de l'esprit tandis que les corps exultent à travers le sexe. Si le propos est toujours aussi cynique, il semble toutefois que le réalisateur ait un peu perdu de son mordant, qu'il s'assagit presque dans un récit qui manque un peu de punch. On reste cependant fasciné par ce portrait saisissant, mais qui souffre cependant d'un scénario un peu faible, où de nombreux détails trop alambiqués polluent un peu trop le cœur du propos.
Ma note : ***