
Film japonais
Titre original : Sansho dayu
Genre : tragédie familiale
Durée : 2h04
Scénario : Yoshikata Yoda et Yahiro Fuji, d’après l’œuvre de Ogai Mori
Image : Kazuo Miyagawa
Musique : Tamekichi Mochizuki et Fumio Hayasaka
Avec Kinuyo Tanaka (Tamaki / Nakagimi), Yoshiaki Hanayagi (Zushio / Mutsu), Kyoko Kagawa (Anju), Eitaro Shindo (L’intendant Sansho), Ryosuke Kagawa (Ummo Ritsushi), Akitake Kono (Taro)…
Synopsis : au Moyen-Age, une famille est dispersée et martyrisée pour avoir défendu les paysans contre un ordre inique du gouverneur. (allocine)
Mon avis : un homme sans pitié n’est pas humain
Riche année qu’est 1954 pour le cinéma. Les États-Unis nous offrent entre autres La comtesse aux pieds nus, Fenêtre sur cour ou La rivière sans retour, la France Touchez pas au grisbi, en Italie sortent Senso et La strada tandis que le Japon révèle Les sept samouraïs ou Les amants crucifiés. Outre cet ouvrage majeur, Kenji Mizoguchi est en particulier bien en verve puisque l’année précédente il nous livrait l’immense Contes de la lune vague après la pluie et que cette même année l’on pourra se délecter devant L’intendant Sansho. Ne volant pas son Lion d’argent au Festival de Venise, le film dépeint subtilement la tragédie d’une famille dans le Japon médiéval.
Il débute avec l’exil forcé d’un père de famille, gouverneur de province qui avait semble-t-il des idées trop libérales pour les autorités fédérales. Au cours de son voyage il s’efforce d’inculquer à son jeune fils ses concepts de vie humanistes avant de l’envoyer vivre avec sa mère et sa sœur. Or, c’est en le quittant que les trois malheureux vont être piégés par des marchands d’esclaves sans scrupules et être définitivement séparés. La mère sera vendue comme courtisane sur l’île de Sado tandis que les deux enfants, Zushio et Anju, vont devenir esclaves sous la férule du féroce intendant Sansho. Dix ans passent durant lesquels ils forgent chacun leur caractère.

Fidélité familiale, honneur et traditions ancestrales : autant de thèmes éternels qui jalonnent les films japonais de l’époque et en particulier ceux de Kenji Mizoguchi. Il est intéressant de noter combien le réalisateur parvient à combiner dans L'intendant Sansho à la fois une cruauté extrême (les scènes de torture, pourtant pudiquement éludées en contre-champ, sont d’une intensité fulgurante) et une tendresse véritable suggérée au travers de la relation qu’entretiennent Zushio et sa sœur ou sa mère (la dernière scène est à ce titre bouleversante de simplicité et d’émotion). Encore une fois, il réussit à ne garder que l’essentiel dans un récit plein de rebondissement : pas de doutes, Kenji Mizoguchi est un brillant raconteur d’histoires.

Ma note : ****